lundi 8 octobre 2018

Interview : Crossfaith




Lors du Download Festival de Paris en juin dernier, nous avons eu la chance de pouvoir nous entretenir avec Ken et Teru du groupe japonais Crossfaith. Retour sur cette rencontre dans la suite du post !





Salut Ken, salut Teru, ravie de vous rencontrer ! Nous allons commencer par discuter de votre prochain album… Vous venez d’annoncer la sortie de ce cinquième opus Ex Machina et de diffuser le premier extrait, The Perfect Nightmare. Pouvons-nous nous attendre à ce que tout l’album soit aussi heavy que cet extrait ?

Ken : Euh… Pas vraiment, en fait ! Bien sûr, on a quelques chansons aussi heavy que celle-là, mais avant de commencer à écrire et composer cet album, on s’est demandés ce qu’on voulait apporter à travers lui, ce qu’on voulait transmettre. Et c’est vrai que notre premier réflexe, c’était de nous dire, tous ensemble « Ok, on va faire un album super-lourd, très métal ». Mais après avoir écrit quelques chansons, on a réalisé qu’il fallait trouver un meilleur équilibre, et que même si les chansons heavy c’est cool, ajouter des chansons un peu plus calmes – quasiment des ballades, si on peut les appeler comme ça – s’imposait aussi. Alors, oui, dans l’ensemble, vous pouvez vous attendre à un album heavy, mais c’est pas du 100% !


Quel serait le fil conducteur de cet album ?

Ken : Il s’agit d’éveiller l’individualité de chacun. Je vais essayer de donner un exemple : aujourd’hui, à travers le monde, tout le monde utilise Spotify ou des plateformes similaires, alors qu’il y a quelques années, on devait aller chez un disquaire ou dans un magasin pour acheter un album, et on avait quelque chose de physique à rapporter chez nous. Je me souviens avoir erré pendant des heures dans les rayons rock et métal, à la recherche d’un nouveau groupe à écouter. Et j’étais trop heureux à chaque fois que je revenais à la maison avec un nouvel album ! Je pense que Spotify change notre façon d’écouter de la musique…

Teru : Pas que Spotify, en fait. Tous les réseaux sociaux – Facebook, Instagram, Twitter – nous façonnent et nous influencent. On y explore des émotions très variées qui ne sont pas que la joie et la tristesse. On ressent toute une palette de choses différentes qui nous apprennent à mieux nous cerner, à mieux connaître qui l’on est vraiment. Mais ça a des bons et des mauvais côtés, parce que même si ça permet de développer notre personnalité, dans un sens, cela nous affecte beaucoup.

Ken : Les nouvelles technologies ont conquis le monde. Elles influencent énormément notre capacité à prendre des décisions par nous-mêmes ; on se base sans cesse sur les choses que les personnes que l’on suit sur les réseaux font, ce qu’elles mangent, où elles vont, ce qu’elles achètent, etc. Parfois, on se sent presque obligé de copier ce que font les autres pour ne pas avoir l’air d’un raté. Sur la chanson Freedom, nous parlons du véritable sens du mot « liberté ». Même si ces réseaux sont pratiques à l’heure actuelle, et qu’on ne pourrait plus s’en passer, ils ont une influence qui peut être néfaste à notre liberté : sommes-nous encore capables de décider par nous-mêmes ? Pouvons-nous encore faire nos propres choix ? La plupart des gens, sans s’en rendre compte, deviennent dépendants de ces réseaux, c’est là qu’ils vont surveiller les autres, s’informer… Pour nous, la liberté, c’est le monde réel : quand on part en tournée dans un bus ou un van, que l’on voyage à travers le monde, que l’on rencontre nos fans en face à face. Comme je le disais, cela éveille l’individu qui est en nous et cela forge notre personnalité. Notre message principal, et le fil conducteur de cet album, ce serait : « Restez conscients, fidèles à vos idées, et concentrez-vous sur le monde réel pour devenir la personne que vous êtes vraiment ».


Comment l’idée de collaborer avec Rou Reynolds, d’Enter Shikari, est-elle arrivée sur le tapis ?   

Ken : Enter Shikari a été une grande influence depuis la toute première fois que j’ai écouté le groupe, quand j’étais au lycée. Nous les avons rencontrés lors d’une de nos tournées au Japon, et nous avons passé beaucoup de temps ensemble à chaque fois qu’ils venaient. Et j’aime ce que véhicule leur musique : c’est très profond, puissant, il y a des idées politiques et engagées très prononcées. Les paroles que Rou écrit ne parlent jamais de lui, mais toujours des autres, de ce qu’il se passe dans le monde. C’est pourquoi nous avons tenu à l’inviter sur Freedom. De plus, je pense que c’est très intéressant de mélanger un peu nos deux points de vue : lui vient de Grande-Bretagne, nous venons du Japon, ce sont des cultures très différentes et pourtant, nos idées peuvent se recouper.


Quelle est la principale différence, selon vous, entre un groupe anglais ou américain et un groupe japonais comme Crossfaith ?

Ken : Les groupes européens sont souvent plus engagés politiquement parlant. Quand on écoute des groupes comme Architects, While She Sleeps ou Enter Shikari, ils consacrent des chansons entières à certains conflits précis, à certains thèmes politiques. Aux Etats-Unis, la plupart des groupes font de la musique de divertissement, si on peut dire ça comme ça. Les artistes vont souvent aborder des thèmes plus généraux et universels : l’amour, le manque, la rage, la peine... Nous, au Japon, je pense qu’on peut dire qu’on se situe un peu entre les deux !


Diriez-vous que c’est plus facile ou plus compliqué pour un groupe originaire du Japon de se faire une place dans la scène metalcore ?

Ken : Oui, c’est plus compliqué pour nous je pense…

Teru : Déjà, il faut dire que le principal problème, c’est la barrière de la langue. Le japonais et l’anglais sont deux langues très différentes, c’est pas évident à apprendre ! Ensuite, on a le lieu : le Japon, c’est une île au bout du monde, ça coûte très cher d’y aller et d’en partir. Chaque voyage, chaque tournée demande des investissements conséquents ; du coup, si les groupes ne sont pas devenus suffisamment célèbres au Japon pour se permettre de voyager ailleurs, ils sont bloqués, car ils ne peuvent jamais s’assurer de rentrer dans leurs frais avant de partir ! Rien ne leur garantit la réussite. Nous, c’était notre rêve de partir à l’étranger, d’exporter notre musique. On a de la chance que ça ait marché, mais ce n’était pas gagné d’avance, et c’était un processus très compliqué… J’espère que plus de groupes japonais auront l’opportunité de voyager, à l’avenir, parce qu’il y en a tellement qui valent la peine d’être vus ! Et je veux qu’eux aussi aient la chance de voir le monde.


Qu’est-ce qui vous manque le plus quand vous êtes loin du Japon ?

Ken : La nourriture !
Teru : [rires] Mmh, je suis assez d’accord !


Qu’est-ce qui ne vous convient pas dans la nourriture française ?

Teru : Je m’y connais pas trop en nourriture française, mais c’est juste que pour nous, tout est meilleur à la maison… C’est une cuisine à laquelle nous sommes habitués. Et les méthodes européennes nous paraissent parfois un peu étranges !


A quoi ça ressemble d’être en tournée avec Crossfaith ?

Ken : Beaucoup de fêtes ! Ça nous arrive de passer une soirée tranquille… parfois… Mais c’est vrai que, la plupart du temps, on préfère sortir et faire la fête !


Vous revenez en France en octobre, mais pour un seul show à Strasbourg, où vous aviez déjà joué. Contents d’être de retour ?

Ken : Très ! Nous avions joué à Paris il n’y a pas si longtemps que ça, et nous sommes de retour pour le Download, donc on est ravis de retourner à Strasbourg cet automne !

Teru : J’espère que ça nous permettra de retrouver nos fans et que beaucoup feront le déplacement pour nous voir ! En tout cas, rendez-vous là-bas !



Vous avez bien compris le message ? 
Crossfaith ne nous ont jamais déçus en live, et Strasbourg c'est cool, 
alors on espère vous retrouver là-bas mercredi 10 octobre !

Propos recueillis en face à face par Laurie B. en juin 2018. 

Photos live Download Paris : Mathilde M.
Autres photos : Page Facebook Crossfaith





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