En avril dernier, SWMRS assurait la première partie d’All Time Low à l’Elysée Montmartre. Ce soir 26 septembre, le groupe était de retour dans la capitale pour un show (gratuit!) en tête d’affiche au Supersonic, et il a littéralement retourné la salle. Retour sur notre entretien avec Cole Becker, chanteur, et Seb Mueller, bassiste.
J’aimerais
commencer par aborder un sujet un peu bidon et à propos duquel vous avez sans
doute déjà dû vous expliquer de multiples fois : le nom de votre
groupe ! Il a changé à plusieurs reprises depuis que vous avez commencé à
jouer ensemble, et j’aimerais connaître les raisons qui vous ont poussés à
renommer votre groupe un si grand nombre de fois ?
Cole : On
parlait justement tout à l’heure du fait qu’on voulait simplement prendre un
nouveau départ pour que l’on puisse nous-mêmes avoir plus de libertés vis-à-vis
de nos chansons. Ainsi, les gens n’auraient pas vraiment d’attaches et personne
ne pouvait dire « Tiens, le premier EP de tel groupe était meilleur, le
deuxième est nul » ou des trucs comme ça. De l’eau coulait sous les ponts,
on évoluait, et nos morceaux ne se ressemblaient du coup plus vraiment parce
que nous grandissions à la fois en tant qu’humains et en tant qu’artistes. Nos
centres d’intérêts et nos envies n’étaient plus les mêmes. Certaines personnes
nous connaissaient déjà avant qu’on entre dans la puberté ! Et il est
inutile de dire que, comme tout le monde, nous ne sommes plus les mêmes depuis
cette période-là.
Les
gens doivent souvent se demander comment prononcer « SWMRS ». Quand
on connaît l’évolution de votre nom il paraît évident qu’il s’agit d’une
version condensée de « Swimmers », mais avez-vous déjà imaginé ce que
votre nom pourrait signifier si ces lettres étaient en fait un acronyme ?
Cole : En fait
oui, on y a déjà pensé ! On avait trouvé « Stand With My Righteous
Sons ».
Seb : Ça ferait
un bon nom pour un groupe de rock chrétien non ?
Cole : Un autre
que nous avions, c’était « Some Whites Making Rock Sounds ».
Seb : Moi j’ai
une mémoire pourrie, je crois qu’on en avait encore trouvé d’autres mais pas
moyen de m’en souvenir. Attends voir… [il réfléchit pendant un long moment,
l’air très concentré] « Store… Wild… Mushrooms… Respectevely Soon »
[lui et Cole explosent de rire].
Vous
êtes tous encore très jeunes, mais vous avez déjà une sacrée carrière derrière
vous. Le groupe a été fondé en 2004, vous n’aviez même pas 10 ans !
Cole : En fait,
il faut avouer que la date de création du groupe n’est pas très claire, pas
même pour nous. Nous avons fondé un groupe avant même de savoir jouer d’un
quelconque instrument, Joey, Max et moi. On était à l’école ensemble et nous
avons regardé le film School Of Rock [Rock Academy en français]. Et à la fin du
film, on s’est regardés en se disant : « C’est ça qu’on veut
faire ! ». Peu de temps après,
nous avons rencontré Seb. On avait déjà changé plusieurs fois de noms, à ce
moment-là on s’appelait Emily’s Army, et on voulait juste s’éclater un peu.
Mais quand Seb nous a rejoints, nous avons assez vite évolué – mentalement et
artistiquement – et on s’est dits « Bon, assez joué. Maintenant, il est
temps de faire de ce groupe notre gagne-pain ! ».
Comment
ont réagi vos parents et vos amis quand vous leur avez annoncé cela ?
Est-ce qu’ils vous ont pris au sérieux tout de suite ?
Cole : Je crois
que nos parents à Max et moi nous ont pris au sérieux, oui.
Seb : Les miens
aussi… je crois ! Mais on a tous la chance d’avoir des parents géniaux qui
nous soutiennent énormément et croient en nous.
Cole : Par
contre nos « amis » de l’époque c’était pas toujours ça… C’est pour
ça qu’on n’est plus vraiment amis aujourd’hui ! Certains d’entre eux me
suivent encore sur les réseaux sociaux et je pense que certains crachent encore
dans notre dos. Mais bon, « haters gonna hate » comme on dit ! Puis
j’ai appris avec le temps à me débarrasser des relations toxiques. On rencontre
tellement de gens qu’on ne peut pas apprécier tout le monde, et chaque personne
qui me donne une raison de lui en vouloir ou de la détester, je m’en éloigne,
tout simplement.
De
2004 à aujourd’hui, quels sont les trois points forts de votre carrière d’après
vous ?
Cole : Wow,
c’est compliqué… Sûrement jouer au Late Night Show de James Corden, cette
émission ultra-célèbre aux Etats-Unis.
Seb : Ecouter
pour la première fois notre premier album dans une intégralité, une fois qu’il
était prêt à être diffusé.
Cole : Le
concert d’Halloween dans la ville dont on est originaire l’année dernière,
c’était un sacré moment aussi. Il y avait environ mille personnes, ce qui pour
nous est énorme. Nous rentrions d’une année de tournée que nous achevions chez
nous… Et l’accueil qui nous a été réservé était extraordinaire. Quand on se
rend dans différents pays, on réalise que le marché, les attentes et les fans
sont différents partout. Alors quand tu rentres chez toi, que tu vois que les
gens font la queue sur des centaines de mètres pour attendre l’ouverture des
portes, c’est absolument dingue !
Seb : Un autre
point fort de notre carrière, c’est un point fort auquel nous avons droit tous
les jours. Nous passons une grande partie de nos journées à travailler, entre
la promo, les balances, le show, l’écriture, tout ça, mais nous prenons aussi
chaque jour le temps de découvrir un peu les villes dans lesquelles nous nous
trouvons. Et se balader à Paris, ou à Tokyo, à des milliers de kilomètres de
chez nous, sur d’autres continents, à des milliers de kilomètres des gens avec
qui tu as grandi, c’est quelque chose dont je ne me lasserai jamais. Ça peut
paraître « normal » à certains artistes, peut-être que certains s’y
habituent et s’en lassent même, mais je suis toujours aussi émerveillé de
découvrir quasiment une nouvelle ville par jour !
Votre
album Drive North est sorti il y a quelques mois, il me semble que pour
l’écrire et l’enregistrer vous avez eu droit à l’aide du père de votre batteur
Joey, Billie Joe Armstrong…
Cole : Absolument !
Tout comme il nous avait déjà énormément aidés avec les albums précédents,
aussi. Il est toujours derrière nous, depuis le tout début.
Pensez-vous
que le fait qu’il ait été là et que les gens assimilent en quelque sorte votre
groupe à Green Day ait contribué à vous rendre célèbres ?
Cole : Tu sais,
c’est très, très compliqué pour les groupes d’attirer le public. Il y a
tellement de formations différentes, les gens passent de l’une à l’autre sans y
prêter trop attention. Bien sûr, ils tiltent quand ils réalisent que Joey est
le fils de Billie Joe. Et de notre côté, on est conscients de la chance que
nous avons de l’avoir auprès de nous. Plus encore que de nous faire gagner de
l’audience, il nous apporte toute son expérience et nous conseille d’une façon
qu’un parent « normal » serait incapable de faire. C’est une chance
inouïe que quelqu’un de si incroyablement talentueux, intéressant et gentil
puisse être notre mentor. Il est en quelque sorte notre « voix de la
sagesse », il sait à quoi ressemble l’industrie musicale et quels sont les
bons chemins à prendre – et, au contraire, les chemins sur lesquels il ne vaut
mieux pas s’aventurer.
Je suis tellement
reconnaissant de l’avoir. De pouvoir lui parler, lui poser des questions sur
chaque nouvelle étape, chaque nouveau tournant. Parfois on a l’impression de
perdre pied, que les choses nous dépassent complétement, et il nous rassure en
disant : « Ne vous inquiétez pas. Cela m’est arrivé à moi
aussi. » ou encore « Green Day est passé par là aussi ».
En grandissant, j’ai
eu l’immense chance de voir à quoi ressemblait la vie d’une rockstar et de
comprendre ce que cela entraînait de faire partie d’un groupe – d’autant plus
que Green Day est l’un des tout derniers véritables groupes de rock. C’est
Billie Joe qui nous a donné l’envie de nous accrocher, et nous avons pu nous
fixer certains objectifs en assistant au succès de Green Day. Bon, en arriver
là où ils sont, c’est sans doute complétement irréalisable – parce que c’est
vraiment les patrons ! – mais agir de façon professionnelle et prendre
notre musique suffisamment au sérieux pour qu’elle nous emmène aussi loin que
possible, c’est en le regardant faire que nous avons appris à le faire aussi.
Avez-vous
déjà envisagé de partir en tournée avec Green Day ?
Cole : Nous
avons toujours évité de le faire. Les gens trouvent déjà suffisamment de
raisons de nous accuser de favoritisme et de « fils à papa », on
n’aimerait pas trop leur donner de raisons supplémentaires de rager – même si,
au fond, on adorerait faire ça. Il ne faut pas se mentir, c’est toujours
agréable d’être sur les routes avec des gens que tu connais et en qui tu peux
avoir confiance.
Cela dit, on va jouer
notre premier show avec Green Day (enfin, après tant d’années !) en
juillet à Hyde Park, à Londres. Et puis, maintenant que nous sommes nous aussi
des musiciens professionnels, ce serait bien qu’on arrive à parler de cette
« collaboration » et que les gens nous prennent un peu plus au
sérieux.
Vous
avez signé avec Fueled By Ramen il y a quelques mois. Cela a-t-il changé
quelque chose à votre manière d’écrire, de composer ou d’enregistrer ?
Cole : Non,
parce qu’en fait nous avions déjà toutes les chansons avant de signer avec
Fueled By. Nous avons mis pas mal de choses au point avec le label au moment de
la signature : pour nous, il ne s’agit pas d’être chaperonnés, on n’a pas
besoin que quelqu’un nous dise quoi faire ou comment le faire. Il s’agit de passer
du statut de « groupe qui fait tout soi-même » à « groupe signé
dans un grand label ». Là où nous avons eu de la chance, c’est que chez
Fueled By Ramen, personne n’a essayé de nous faire entrer dans un moule, au
contraire : ils apprécient et respectent la singularité de chaque groupe.
On garde toujours énormément de libertés. Pour un groupe indé, c’est une chance
inouïe de signer auprès d’un si gros label.
All
Time Low ont eux aussi annoncé avoir rejoint Fueled By Ramen il y a quelques
mois d’ailleurs ! Ecoutiez-vous la musique du groupe avant d’apprendre que
vous partiez en tournée ensemble ?
Cole : Nous
avons tellement baigné dans la scène « DIY » que nous ne côtoyions
quasiment que des artistes issus de cette scène-là… C’est vrai qu’on n’a jamais
beaucoup écouté All Time Low en grandissant, même si on connaissait les
classiques du type Dear Maria. Mais aujourd’hui, c’est tellement dingue de les
voir sur scène, de pouvoir assister à leurs petits rituels, de partager leur
quotidien ! Quand tu es habitué à tourner avec les mêmes personnes ou le
même « genre » de groupes, tu vois toujours les mêmes gestes, les
mêmes façons de faire. Alors qu’avec eux, nous découvrons un nouvel univers !
Quel
est le moment qui vous a le plus marqué sur cette tournée ?
Cole : Il y a un
show de la tournée, où je disais que c’était mon concert préféré, mais je ne
sais plus où c’était…
Seb : Cambridge ?
Cole : Cambridge
c’était bien ouais, mais il y en avait un autre plus tard, aussi. Il y a eu
toute une succession de shows que j’arrive plus à replacer.
Seb : Norwich ?
Cole : Oui, Norwich
c’était super cool mais il y en avait encore un autre avant. Peu importe :
il y a eu trois ou quatre concerts où l’énergie du public était
particulièrement positive. On est très bien reçus partout, mais ces quelques shows-là
étaient vraiment exceptionnels. Un autre moment fort de la tournée, c’était la
première fois où nous avons vu la bite de Jack [All Time Low]. Cela restera
gravé à tout jamais dans nos mémoires…
Seb :
Franchement, n’importe qui ! On aime tellement être sur les routes qu’on
pourrait vraiment le faire avec n’importe quel groupe.
Cole : Oui, n’importe qui… Mais si je pouvais, je choisirais un petit groupe avec lequel nous sommes amis et que nous n’avons jamais l’occasion de voir parce que chacun est en tournée de son côté. Ce sont des groupes comme Diet Cig ou Power Button. Dans le milieu musical, on se fait sans cesse de nouveau amis que l’on rencontre en tournée ou sur des festivals, mais manque de bol quand on rentre de tournée, on habite à l’autre bout du pays l’un de l’autre.
Vous
avez déjà eu l’opportunité de jouer à un certain nombre de festivals, mais y en
a-t-il un que vous rêveriez de faire ?
Cole : Burning
Man ! Non, plus sérieusement, Lollapalooza ce serait top. Mais je préfère
attendre encore un peu avant de participer à des trop grands festivals, parce
que c’est toujours bizarre de jouer sur une scène ultra-reculée à une ou deux
heures de l’après-midi, on n’est pas vraiment dans l’ambiance festival… Pour
être honnête, j’aime pas vraiment les festivals !
Vous
est-il déjà arrivé de penser que vous aviez fait une erreur en quittant l’école
pour vous consacrer à la musique ? Vous n’avez jamais eu envie de faire
machine arrière ?
Cole : Non,
jamais. Et cela n’arrivera jamais. Nous sommes des musiciens, la musique coule
dans nos veines, c’est une chose qu’on ne peut pas nier et à l’encontre de
laquelle on n’ira jamais.
Seb : Cela dit,
j’ai toujours dans un coin de ma tête l’envie de faire une école de médecine. J’y
serais sans doute s’il n’y avait pas eu le groupe ! Mais ce n’est pas pour
autant que je regrette d’avoir arrêté l’école, j’adore faire partie de SWMRS et
nous vivons ensemble une aventure vraiment extraordinaire.
Cole : Comme
dans tous les groupes, il nous arrive de ne pas être d’accord sur certains
points et la tension monte alors un peu. Mais aucun d’entre nous n’est jamais
parti en disant « Allez vous faire foutre, je quitte le groupe » !
Mais même si cela devait arriver, ça ne voudrait pas dire que l’on arrêterait
de faire de la musique pour autant. La musique révèle qui nous sommes, nous
nous affirmons à travers elle. Chacun a sa passion, pour certains c’est l’écriture,
ou la peinture, ou leur job, nous c’est la musique. C’est une partie de qui
nous sommes.
Imaginez que pour une raison ou pour une autre, vous n’aviez jamais formé ce groupe. A votre avis, où seriez-vous aujourd’hui ?
Cole : Je
travaillerais sûrement dans les mines de charbon. J’aime à penser que je ferais
quelque chose qui aurait un impact positif sur la vie de certaines personnes.
Si je pouvais devenir défenseur de l’ordre public, ou avocat, un truc comme ça.
Mais pour être honnête, je dis ça parce que la situation ne se présente pas ;
si je devais rester réaliste, je pense que je serais en train d’exercer un job
banal comme caissier ou serveur.
Seb : Et moi je
serais soit en train de devenir médecin, soit aussi coincé dans un petit job
alimentaire !
Il ne nous reste plus
qu’à souhaiter beaucoup de succès dans votre carrière musicale, du coup !
Pour conclure l’interview, connaissez-vous quelques mots en français ?
Seb : Cole parle
couramment le français !
Cole : [en
français] Oui ! Mais je ne suis pas vraiment bilingue…
Mais on aurait pu
faire l’interview en français ?
Cole : Euh… Tu
aurais pu essayer, mais je pense que je n’aurais pas compris la moitié des
questions ! Ou alors j’aurais été incapable de répondre. [Il continue en
français] Est-ce qu’il y a des phrases importantes à dire sur scène ?
« Bonjour Paris »,
« Merci d’être venus »…
Cole : Est-ce
que ça se dit « Sautez avec moi » ?
Oui, aussi ! Tu
n’as pas besoin de moi en fait, tu t’en sortiras très bien !
Seb : Avec moi
on serait pas allés bien loin, je connais juste « fromage » et « jambon » !
Et le 26 septembre, pendant le set de SWMRS, Cole nous a prouvé une nouvelle fois qu'il maîtrisait parfaitement notre langue, n'hésitant pas à se lancer dans des discours engagés. Le groupe nous a offert une soirée survoltée et très rafraîchissante, promettant de revenir très vite dans la capitale.
Interview réalisée en face à face par Laurie B.
Merci à Valentin G. de Warner Music.
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