mardi 2 février 2016

Chronique : Basement - Promise Everything

Si Colourmeinkindness était sorti à la même période que Siamese Dream ou Nevermind, il y aurait eu une chance pour que ce disque devienne culte. Représentant lors de sa sortie en 2012 un crossover parfait entre l'emo, le pop-punk et le grunge, ce disque aurait dû être le dernier d'un groupe ayant ainsi laissé orpheline une jeunesse anglaise touchée de plein fouet par un album coup de poing, ultra-émotionnel, direct, cinglant. Mais Basement a pris tout le monde de court en annonçant son retour 2 ans plus tard et en revenant avec l'EP Further Sky qui dévoilait des influences britpop surprenantes. Et il nous propose en ce début 2016
Promise Everything, un titre qui évoque ce qu'était le groupe à partir de son album-phare : plein de promesses. Mais cruel constat, l'album est loin d'être mauvais dans la forme, mais se révèle décevant dans le fond.

Toi, jeune emo vivant épanoui (ou non) au cœur de la vingtaine, tu as forcément partagé sur Facebook et Tumblr les paroles de "Covet" ou de "Pine" : des textes complètement simplistes et adolescents, illustrant directement les sentiments du frontman Andrew Fisher par rapport à ce qu'il estime valoir, et la complexité des rapports humains, et surtout amoureux. C'est ce côté straight-from-the-heart assumé, couplé à l'énergie du désespoir et un talent indéniable pour composer des mélodies aussi accrocheuses que saturées, qui a instantanément touché en plein cœur le moindre emokid étant tombé sur ce disque. A quelques exceptions près évidemment, tout le monde n'étant pas fan de musique essentiellement basée sur un mur de guitares, on le conçoit. Mais hey, justement, il est peut-être la, le ticket d'entrée idéal pour Promise Everything : proposer une version light du grunge puissant et lancinant de Colourmeinkindness, un disque plus accessible tout en restant dans un ton désabusé et sensible dans les textes. Mais ce qui était à la base une idée géniale, et pouvant donner LE disque qui aurait pu faire exploser la carrière des Anglais désormais basés aux USA, a finalement donné lieu à un album au potentiel énorme, mais en réalité quelque peu creux.

Nullement vide d'émotions, mais peu inspiré d'un point de vue musical, alors que paradoxalement, les Anglais voulaient davantage laisser place à leurs influences (très éclectiques de surcroît, comme le montre ce top 13 des chansons du groupe) dans leur univers musical et affirmer leur penchant pour les mélodies. Mais on obtient un rendu qui tombe un peu à l'eau... Contrastant cependant avec "Aquasun", assurément le titre-phare de l'album et une machine à sing-along. On pense tout d'abord instantanément à "Be Quiet And Drive" de Deftones sur l'intro de ce titre, et sur ce morceau tout est intelligemment mené : la densité émotionnelle va crescendo sans basculer dans les hurlements, le chant d'Andrew reste continuellement dans la sensibilité et la douceur, et le format pop du morceau ne trahit en aucun cas les racines alternatives de la bande. Bref, voici un bon petit hit. Mais alors que le précédent album en contenait 10, Promise Everything n'en délivre qu'un seul, et propose 9 autres chansons qui parfois nous font bouger la tête et sonner les tympans, et parfois nous ennuient. On retrouve nos repères avec "For You The Moon" et ses riffs dissonants ainsi que son groove lazy et percutant à la fois, les origines pop-punk semblent refaire surface sur le titre éponyme du disque... "Bon, c'est cool alors, il est pas mauvais finalement ce disque ?" me direz-vous. Bien sûr, il n'est pas nul, soyons franc. Mais des titres comme "Oversized" et le final "Halo" paraissent bien longs, tout sonne vide et forcé... L'expérimentation semble ratée et quelque peu superficielle, surtout lorsque les paroles se répètent comme sur "Halo". Comment ont-ils pu échouer à l'exercice du changement, alors que Further Sky le réussissait bien mieux, avec des idées solides, rafraîchissantes et un ensemble ne ressemblant au final qu'à Basement ?

Heureusement, le reste du disque ne déçoit pas autant, mais nous laisse avec un sentiment de frustration ou de déjà-entendu : "Submission" aurait pu être composé de A à Z par Jimmy Eat World pour figurer sur Futures,  et "Blinded Bye" nous renvoie directement aux influences emo du quartet mais sonne comme beaucoup d'autres titres du genre. Oui, c'est efficace et catchy, mais le groupe pouvait faire franchement plus passionnant, et l'a prouvé sur l'EP précédent. On ressort de ce disque avec la satisfaction de retrouver un groupe qui n'a pas changé en soi, mais la déception de le voir se perdre un peu entre l'envie de ne pas trop s'éloigner de ses racines, et l'envie de complètement s'en émanciper. Promise Everything est un disque qu'il sera bon d'écouter pour avoir le blues facile à coups de riffs généreux et faciles, mais loin d'être à la hauteur ce que l'on pouvait attendre d'eux, et de ce qu'ils sont capables de faire.

3/5

Guillaume D.

1. Brother's Keeper
2. Hanging Around
3. Lose Your Grip
4. Aquasun
5. Submission
6. Oversized
7. Blinded Bye
8. For You The Moon
9. Promise Everything
10. Halo





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